No Future


Green Light


Indépendamment de l’ensemble de la politique menée par le gouvernement français, je trouve qu’un régime unique pour la retraite aurait ses avantages, s’il est lisible. Par contre, n’augmenter les années de cotisations que pour les futurs salariés fait porter tout à la jeunesse, ce qui n’est pas acceptable, un peu comme le contrat nouvelle embauche qui créait un clivage dans la société. Une telle décision ouvrirait officiellement la guerre entre générations.

Je suis par contre en phase avec une déclaration qui concerne le pessimisme ambiant. Si la situation des gens se dégrade, c’est une chose, mais penser que l’état français doit faire du soutien d’un site fabricant des machines à laver une priorité n’a que peu de sens car il faudrait alors faire de même pour toute pme, pour toute entreprise industrielle française et ce n'est pas possible, mais je comprends aussi que les salariés concernés tentent le tout pour le tout pour sauver l’emploi. Dans ce cadre j'ai aussi été choqué par le manque de respect vis à vis des représentants de l'état.

En revanche et c'est le rôle de l'état, la mise en place de politiques et stratégies industrielles protectionnistes à l’échelle de l’Europe et d'action concrètes en ce sens éviterait la fuite des industries vers la Chine, à défaut d’éviter la fuite vers les pays de l’est de l’Europe. L’Europe était un projet d’union, il devient un projet de concurrence acharnée entre pays d’une même union monétaire bancale, à coup de dumping fiscal, passes droits pour les multinationales qui jouent le jeu et délocalisent quand elles veulent, tout en ayant bénéficié d’aides des régions et de l’état.

C’est cela qu’il faut revoir, avant que l’union monétaire n’explose en vol. Il est évident que les pays de l’est ont drainé beaucoup d’emplois et détruit des filières en France et ailleurs, mais ce n’est que transitoire : ils sont les prochains sur la liste. Les salaires asiatiques ou africains sont plus bas et le combat de ces mêmes pays de l’est est perdu d’avance.

Sans politique de protection à l’échelle de l’Europe, ce qui ne signifie pas un protectionnisme strict, mais une prise de conscience qu’il faut mettre des limites au libre-échange, les problèmes vont s’accroitre à un rythme très rapide, en particulier dans le domaine de l’automobile. Le seul moyen d’éviter la concurrence des autres blocs (USA, Chine) est de proposer un modèle différent, par exemple un modèle d’économie circulaire, d’écoconception appliqué de manière réelle dans les produits européens. Concevoir un produit associé à un service qui permet d’assurer la maintenance du même produit, son caractère réparable, peut éviter de changer, jeter, sous prétexte que la réparation est à peine moins chère que le produit d’origine. Si on ne sort pas de cette logique stricte du coût de revient des produits (ou des services) au moment de l’achat, il sera impossible de concurrencer des pays à bas salaires. Il faut aussi une prise de conscience au niveau des individus, qui au lieu de chercher le prix le plus bas au centime près sur internet, devraient s’intéresser aux impacts de leurs choix de consommation. La rationalisation à l’extrême de l’économie apporte la productivité, la baisse des coûts, mais pas l’emploi, à l’heure des GAFA et des gains privatisés à l’autre bout de la planète. A ce titre la taxe sur les GAFA était une réponse de court terme pour éviter que l’Europe ne se retrouve dominée par les deux blocs USA-CHINE.

Enfin, il faudrait quand même ouvrir le débat qui concerne l’automatisation des tâches et ses impacts majeurs sur la société, impacts qui dépassent le seul emploi et qui vont selon moi jusqu’à créer des gens dépendants d’applications ou de systèmes, qui naturellement vont perdre en autonomie, en créativité, excepté si le système éducatif s’adapte à ce nouveau contexte. Un revenu universel paraît pour certains un assistanat généralisé mais ce type de proposition s’appuie sur des faits : la productivité augmentant, il y a un moment où il n’est plus ni possible ni nécessaire d’accroitre la production, surtout si on va vers plus de recyclage et d’une utilisation plus raisonnable des ressources. La quantité de travail doit donc diminuer tendanciellement, et dans le contexte d’économies ouvertes à l’échelle mondiale, le chômage de masse peut assez rapidement devenir la norme, tout comme l’accaparation des gains de productivité par un petit groupe de gens. Une société comme celle-là ne donne que peu de chance au maintien d’un système démocratique à moyen/long terme : il convient donc de réétudier le rapport que l’on a au travail (et au capitalisme). Que certains fassent 50 heures pendant que d’autres restent en recherche d’emploi est efficace au sens d’une entreprise, mais probablement pas à l’échelle d’un pays : cela crée des sociétés à plusieurs vitesses, inégales, violentes, instables. 

Au passage puisque c’est l’actualité, je note que le cybertruck présenté par le grand gourou des technologies du futur ne plaira qu'à ceux qui rêvent d’une société qui ressemblerait à la fois à Blade Runner et Demolition Man et manque de chance je n’en fais pas partie.

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